Ne nous méprenons pas, je ne vais pas vous apprendre ici à lire les caractères japonais (si vous croyez que cela peut s’apprendre en quelques lignes sur un blog et bien… vous vous trompez…), je vais juste vous apprendre à correctement prononcer le japonais quand celui-ci est retranscrit en alphabet latin (en Rōmaji comme on dit là-bas).
Tout d’abord, sachez que les Japonais n’écrivent que peu ou pas en Rōmaji (les vieilles générations ont même parfois du mal à les lire), par contre, nous Occidentaux aimons bien les utiliser, pour la drôle de raison que c’est l’alphabet que nous avons appris quand nous avions 5-6 ans…
Donc ici, je vais tout bêtement vous apprendre à prononcer correctement les mots japonais, que vous lisez sur ce blog ou ailleurs, quand ils sont retranscrits en alphabet romain.
Commençons par le fait qu’il existe plusieurs façons officielles de retranscrire le japonais en Rōmaji. Je vais en mentionner deux, tout simplement parce qu’il s’agit des deux méthodes les plus utilisées aujourd’hui. La méthode Hepburn (du nom du missionnaire américain qui l’inventa vers 1867 et la méthode Kunrei inventée par Aikistu Tanakadate – sur qui je n’ai aucune autre information – en 1885 (merci wikipedia). Pour faire vite, Hepburn a inventé une retranscription basée sur la phonétique anglaise. Plus ou moins à la même époque, une autre méthode dite Nihon-shiki, plus proche de la logique des Kana, fut aussi conçue. On notera qu’à cette époque, certains Japonais militèrent pour l’abandon total des Kana et l’adoption générale du Nihon-shiki comme système d’écriture au Japon. C’était l’époque où le Japon se modernisait et s’occidentalisait. Toutefois, le mouvement ne fit pas long feu, mais en sortit une méthode dérivée du Nihon-shiki et dénommée Kunrei-shiki. Elle est, depuis 1989, la méthode officielle de transcription du japonais en Rōmaji au Japon (c’est d’ailleurs celle que 康代 utilise quand elle retranscrit du japonais en alphabet latin), sauf que… Les Occidentaux eux, utilisent toujours la méthode Hepburn… Les Japonais aussi d’ailleurs quand il s’agit de transcriptions « officielles » et datant d’avant 1989. Comme pour les noms de lieux par exemple (toute personne ayant pris le train au Japon pensera de suite au nom des gares).
Et c’est aussi celle-ci que j’ai apprise et que j’utilise quand j’écris des mots japonais dans ce blog ou ailleurs et c’est donc celle-ci dont je vais vous parler ici en plus de détails.
En fait, si vous ne parlez pas trop mal l’anglais je ne vais pas vous apprendre grand-chose puisque les lignes qui vont suivre vont presque plus se rapprocher d’un cours de prononciation anglaise que japonaise. En effet, vous savez peut-être déjà que le japonais comporte un nombre de phonèmes (de sons) très limité comparé au français et à l’anglais, si bien que pratiquement tous les sons du japonais existent aussi en anglais et en français (même si certaines subtilités existent).
Voici donc la liste des syllabes qui se prononcent différemment en français et en Rōmaji (pour les autres, c’est comme en français tout bêtement, Ka en Rōmaji se prononcera [ka] comme en français) :
- E se prononce toujours [è] en japonais.
- U se prononce toujours [ou]. Le son [u] du français n’existe pas en japonais.
- Sa se prononce toujours comme sa (le pronom possessif en français), même au milieu d’un mot. L’exemple le plus commun est : Osaka que de nombreux français prononcent [ozaka] alors qu’il faut le prononcer [ossaka]. Même chose pour Se (qui se prononce donc [sè]), So et Su [sou].
- Za se prononce quant à lui à l’anglaise, donc un son plus proche de [dza] en fait. On retrouvera la même chose avec Zu, Ze, Zo.
- Ha : le H est prononcé et expiré comme en anglais (sauf que presqu’aucun français ne sait le faire en anglais non plus). En gros, il faut souffler en prononçant votre A. Littéralement ! On doit sentir de l’air sur ses doigts si on met la main devant la bouche à ce moment-là. Même chose pour He, Ho, Hi.
- Ra : le R japonais n’a rien à voir avec le R français, ni même avec le R anglais. C’est en fait un son hybride situé entre le [r] et le [l]. C’est d’ailleurs pour cela que dans mes mauvaises imitations de Japonais, tous les R sont remplacés par des L et que les célèbres nouilles sont parfois retranscrites en Ramen et parfois en Lamen.Comment se prononce-t-il alors ? Ben « un son hybride quelque part entre le [r] et le [l] ». Dans la pratique, parfois il est plus proche du [r], parfois plus proche du [l], ça dépend des mots et aussi des gens je suppose, voire même peut-être des accents régionaux.Même chose pour Ri, Ru, Re, Ro.
- Wa se prononce à l’anglaise, c’est ça dire [oua] et pas [va]. Pareil pour Wo.
- Ba : pas de problème particulier pour le Ba, sachez toutefois qu’un peu comme en Espagne, le B et le V sont plus ou moins le même son (en fait le [v] n’existe pas en japonais). Même chose pour Bi, Bu, Be, Bo.
- Cha se prononce à l’anglaise, c’est-à-dire [tcha]. Ne pas confondre avec Sha que nous allons voir de suite après.. Même chose pour Chi, Chu, Cho.
- Sha se prononce plus ou moins comme vous l’imaginez, mais pas exactement en fait, le [sh] japonais est plus chuintant que son homologue français, il y a un peu de [j] dedans (pensez à « Ich » si vous êtes germanophone). Idem pour Shi, Shu, Sho.
- Gi se prononce comme Gui en français. Ce blog et l’île qui lui a donné son nom se prononcent donc [ogui] et pas [oji]. Pareil pour Gya, Gyu, Ge, Gyo.
- Ji se prononce plus près du Ji anglais que français, c’est-à-dire [dji] et donc le nom de ce blog se prononce [ogui-djima] et pas [oji-jima]. Même chose pour Ja, Ju, Jo.
- Fu : le [f] est à peine prononcé, il s’agit en fait d’un son hybride entre le F et le H expiré.
- Ai se prononce [a] puis [i], il s’agit de deux sons distincts et aucunement du ai français prononcé [è]. Même chose pour les autres : Ei [è-i], Oi [o-i], Ui [ou-i].
- On : vous le savez certainement, les syllabes japonaises sont toujours composées d’une consonne et d’une voyelle. À une exception près, les syllabe se terminant par N. En fait on peut en rajouter un à la fin de n’importe quelle syllabe mentionné au-dessus. Pour une raison que j’ignore j’entends très souvent les français prononcer ces N comme en anglais (ils prononcent bel et bien le [n]) alors qu’en fait pas du tout, le son adéquat -sans être totalement équivalent- est en fait presque une nasalisation à la française ! En d’autres termes San se prononce comme le mot « sans » en français [san] et pas du tout [sanne] ou quelque chose approchant.
Voila, je crois que je n’ai rien oublié. (et si vous êtes un nippophone confirmé et que vous voyez des erreurs, n’hésitez pas à m’en faire part.
Je terminerai par deux choses :
- Le O et le U en fin de mot sont souvent muets en japonais et ne sont que peu ou pas prononcés (un peu comme le E final en français). C’est pour cela que Takamatsu ne se prononce normalement pas [takamatsou] mais bien [takamatss].
- Parfois, on voit un trait horizontal au dessus de ces deux lettres : ō et ū. Si vous les trouvez en fin de mot, cela signifie qu’il faudra alors les prononcer, voire même les accentuer un petit peu. Ailleurs dans un mot, il faudra tout simplement allonger le son (et l’accentuer un petit peu).
Voila, maintenant vous savez comment lire tous les mots que je retranscris du japonais.
Quelques derniers détails :
- Très souvent je capitalise les mots japonais dans mes textes. Ceci n’est absolument pas une règle, c’est quelque chose que je fais de mon propre chef, pour qu’ils ressortent un peu du texte et de ce fait ne « surprennent » pas la lecture.
- J’essaie d’écrire les mots japonais entrés dans la langue française selon leur orthographe française, mais il peut m’arriver d’utiliser la transcription Hepburn. Bref, vous trouverez des samouraï et des Samurai, j’espère que vous ne m’en tiendrez pas rigueur.
- La langue japonaise n’a pas de marque du pluriel, de ce fait, pas de S à la fin des mots, même s’il s’agit d’un pluriel.
- La langue japonaise n’a pas non plus de masculin, ni de féminin, donc comme le veut la langue française, les termes n’étant pas d’origine latine sont considérés comme masculins en français, sauf les termes désignant des femmes bien entendu. On dira donc un Manga (n’en déplaise à certains) mais bien sûr, une Geisha.
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Salut,
et merci pour toutes ces infos utiles sur le futur débutant que je suis en langue japonaise (niveau manga, en gros), ainsi que pour tous tes articles qui offrent une vision bien différente du traditionnel « que faire à Tokyo », nécessaire (comme lu sur un blog, même si Tokyo n’est pas le Japon, un lieu ou vivent presque un quart de la population japonaise est japonais) mais non suffisant pour découvrir le japon dans ses aspects moins connus mais non moins intéressants (et parfois plus, selon ce que recherche le voyageur)…
Juste deux choses:
-« les syllabes japonaises sont toujours composées d’une consonne et d’une syllabe » Tu voulais pas plutôt dire une consonne et une voyelle?
-Bien qu’étant ni bilingue français-japonnais, et bien que n’ayant jamais eu l’occasion de voyager au japon (mais dès que je serai en mesure de payer le voyage et de « parler » japonais un minimum, je corrige ça), le peu de japonais que j’ai entendu me fais douter du « San= Sans en français » (cf Princesse Mononoké lorsque le héros appelle l’héroïne, qui s’appelle « San », justement, même si on n’entends pas forcement le « n », le début ressemble plus au son « ça » qu’au son « Sans »), et de même pour Sen (cf Le voyage de Chihiro, où l’héroïne se fait appelée « Sen », plus entendu « Scène » que « Cent »)
Bon, après je ne peux dire ça qu’à partir de références restreintes (même si j’ose espérer que les studios Ghibli ne s’amusent pas à demander aux acteurs de prendre des voix et des accents pas japonais du tout pour leurs films d’animations), mais je tenais à le dire. Bonne continuation!
Merci pour ce commentaire et les compliments.
(merci aussi pour la correction)
Concernant le « san » et tous les « n » finaux en fait, je ne suis pas un spécialiste, donc je ne pourrai te répondre en détails, je ne me base que sur ce que j’ai l’occasion d’entendre et mon épouse de m’expliquer, mais il est de mon ressenti que les Français ont tendance à surprononcer le N final, alors qu’il s’agit surtout d’une nasalisation de la syllabe. Maintenant il est très possible qu’il y ait des variations régionales là dessus.
Merci (et de rien)
Je suis encore moins spécialiste que toi et c’est déjà bien expliqué:
Effectivement, j’avais zappé l’histoire de la nasalisation dans ton article, peut-être parce que ce qui est entre parenthèse percute moins que le reste, et il est vrai qu’après avoir tester le fait de parler avec le nez, ça me parle plus et ressemble plus à ce que j’ai pu entendre ici et là que ce que je m’étais contenter de lire la première fois.
Quant aux variations régionales, je n’en suis pas encore là, même si, en effet, elles existent probablement.
Pour être sûr qu’il n’y a pas de malentendu, la « nasalisation » c’est pas exactement « parler avec le nez » c’est tout simplement la façon francophone (et non anglophone) de prononcer des sons tels que « -en » « -on » « -in » etc. 🙂
Dommage, parce que malententu il y avait…
Tant pis, je verrais bien quand j’apprendrais et quand j’aurais l’occasion d’entendre et d’écouter « en live »!