Après m’être tenu à l’écart des îles de la région pendant plus d’un an (à de très rares exceptions socialement distantes), j’essaie d’y aller autant que possible cet automne. On ne sait pas trop de quoi l’avenir est fait n’avoir pratiquement pas été dans les îles pendant plus d’un an (à cause de vous savez quoi), j’y suis allé plusieurs fois cet automne. Il fait beau en ce moment, le nombre d’infections est au plus bas, et nous ne savons pas de quoi l’avenir est fait : il n’y a donc pas à hésiter.
Après Ogijima la semaine dernière (j’y suis allé avec un ami et pour y voir des amis, donc pas de photos, ni trop rien à raconter ici) et Naoshima un peu avant (article, photos et vidéos sont à venir), aujourd’hui c’était Shodoshima.
Je n’arrive pas à croire que je n’étais pas rendu sur Shodoshima depuis deux ans et cela aurait probablement été encore plus long si je n’avais pas reçu une invitation pour un mini-tour très spécial de l’île.
Il y a quelques jours, j’ai reçu un message d’une amie de Koebi-tai (l’organisation bénévole qui s’occupe de tout un tas de choses pour la Triennale de Setouchi) m’invitant à une visite guidée de l’île. C’était une visite très particulière : les guides étaient des lycéennes locales qui apprennent et s’entraînent à être guides sur leur île, et certaines d’entre elles le font même en anglais. Bien sûr, pour s’entraîner à guider, il faut qu’il y ait des gens à guider. C’est donc le rôle que quelques autres personnes et moi-même avons joué hier.
Nous n’avons visité que quelques endroits, mais dans l’ensemble, c’était très chouette et j’approuve totalement ces initiatives locales. Les élèves ont vraiment fait un travail formidable.
Pouvez-vous vous imaginer, à 16 ou 17 ans, en train de guider un groupe d’adultes (qui connaissent l’île aussi bien que vous pour la plupart) et de le faire en partie dans une langue étrangère ? Moi non plus.
Ouais, elles ont vraiment assuré, et je suis vraiment fier d’elles, non seulement pour leur prestation, mais aussi pour qu’elle choisisse tout simplement de le faire. On imagine souvent les jeunes sur les îles voulant en partir le plus rapidement possible. C’est souvent malheureusement le cas, mais une constante que je rencontre chez tous les jeunes de Shodoshima (y compris mes étudiants de temps à autres) c’est qu’ils aiment vraiment leur île et qu’ils ne la quittent qu’à regret la plupart du temps quand ils doivent le faire. Et c’est compréhensible. C’est vraiment une chouette île qu’ils ont.
J’ai aussi pris quelques photos.
Nous avons commencé au port de Tonosho et, oh surprise, j’ai enfin pu voir l’une des très rares (trois ? Je pense) œuvres d’art de la Triennale de Setouchi 2019 que j’avais manquées sur Shodoshima.
Il s’agit de again… (c’est le nom de l’œuvre) de Kim Kyoung-Min.
Bon, on ne va pas se mentir, elle m’a pas fait très grande impression. Je m’en doutais un peu à l’époque, c’est pour cela que la rater en 2019 ne m’a pas trop empêché de dormir. Si, la voir de près m’a permis de comprendre qu’il s’agissait en fait d’un hommage à Shodoshima : le métal ayant « dégouliné » représentant l’île, élévations comprises. Et le morceau « manquant » dans le demi-cercle a plus ou moins la forme d’une montagne, et de son kanji: 山.
Après en avoir eu terminé avec le port de Tonosho (les élèves nous ont également présenté Gift of the Sun), nous avons pris un bus pour Nakayama. Nous ne sommes malheureusement pas allé voir les « 1000 rizières » (nous l’avions fait trois ans plus tôt) mais nous nous sommes concentrés sur le théâtre Kabuki de Nakayama.
Pour faire court, pendant la Période Edo, Shodoshima a développé une culture (unique ?) de théâtres kabuki ruraux. Le kabuki est généralement un art plutôt urbain et bourgeois, mais l’histoire raconte que Shodoshima – en raison de sa situation centrale dans cette partie de la Mer Intérieure de Seto – était un grand « comptoir commercial » de l’époque, et que les résidents de Shodoshima voyageant souvent à Osaka ont ramené le kabuki sur leur île où une forme rurale de ce style de théâtre s’est développée. À son apogée, il y a eu jusqu’à 40 théâtres sur Shodoshima. Aujourd’hui, il n’en reste plus que deux, mais ils maintiennent la tradition vivante et organisent des représentations à certaines périodes de l’année (ils ne l’ont pas fait dernièrement à cause de la pandémie – de nombreuses activités traditionnelles ont dû s’interrompre ces deux dernières années – les matsuri aussi viennent à l’esprit).
Le kabuki a aussi une dimension religieuse, ici liée aux récoltes de riz, c’est pour cela que l’on trouve aussi un sanctuaire faisant face à la scène :
Un des responsables du théâtre était là, et il nous a montré l’intérieur du bâtiment vieux de 350 ans environ (c’était une première pour moi) :
Bon, c’était un peu le bordel dedans et ça ressemblait plus à un débarras qu’à un théâtre multi-centenaire, mais c’est compréhensible quand il n’a pas pu être utilisé depuis deux ans.
Notre prochain arrêt était l’Olive Park, et il était plein de touristes !
Avec toutes les discussions sur l’interdiction des touristes étrangers dans le pays, on a parfois tendance à oublier que le tourisme national existe toujours. En fait, Shodoshima n’est peut-être même pas vraiment affectée par l’absence de touristes étrangers, car l’île est surtout une destination touristique pour les Japonais – la plupart des étrangers n’en ont jamais entendu parler.
L’un des sites les plus célèbres de Shodoshima est la gorge de Kankakei. Et c’est à la fin novembre qu’elle est la plus belle. Autrement dit, j’avais oublié que cette période de l’année n’est pas la basse saison sur Shodoshima, bien au contraire. C’est probablement la période la plus chargée de l’année.
Et si la gorge de Kankakei est la plus célèbre destination sur l’île, l’Olive Park est clairement la deuxième.
Pour rappel, Shodoshima est le seul lieu du Japon où les oliviers ont réussi à être implantés. Les olives sont aujourd’hui une des choses à laquelle Shodoshima doit sa renommée, et cela explique aussi la présence du moulin grec si vous vous demandiez pourquoi.
Puis nous sommes allés au lycée de Shodoshima pour un debriefing, partager nos impressions avec nos guides et ce genre de choses.
Ce fut ensuite l’heure des adieux et du retour au port de Tonosho où chacun partit ensuite vers sa destination.
Gift of the Sun et le ferry qui allait me ramener à Takamatsu qui approchait.
Petite anecdote : Quand cette sculpture fut créée en 2013, l’artiste avait demandé à un certain nombre d’enfants de l’île d’écrire des messages qui furent ensuite gravés dans les « feuilles. » Il se trouve que l’une de nos guides était l’une de ces enfants il y a neuf ans. C’est pas grand chose, mais j’aime toujours quand les expressions telles que « les enfants de l’île, » « les résidents, » etc. deviennent un petit peu moins anonymes.
Coucou, Ogijima! À bientôt, je l’espère.
Voila, c’est tout pour aujourd’hui. J’espère que cette mini-visite vous a plu. Personnellement, j’ai beaucoup aimé (qui n’aime pas une après-midi sur Shodoshima) et je le répète, je suis vraiment fier de nos apprenties guides. J’espère même les retrouver dans un ou deux ans dans ma salle de classe, qui sait ?
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